La première partie plaçait déjà la barre très haut, la seconde est tout simplement MAGISTRALE !
Débutant par un attroupement de policiers, journalistes et photographes autour de la voiture de Mesrine après son assassinat, Jean-François Richet donne le ton de cet épisode. Cette ouverture est filmée d'une manière quasi identique aux vidéos de l'époque, diffusées lors des journaux télévisés, on a l'impression de se trouver devant un documentaire tellement la technique utilisée ici est efficace, voire parfaite.
Après cette première séquence qui joue déjà avec les nerfs du spectateur, Richet utilise le même système chronologique que dans L'Instinct de Mort, à savoir un retour en arrière (ici, ce n'est plus la fin du service militaire du héros en Algérie, mais sa comparution dans un bureau de police) fort différent que dans le premier film. En effet, la caméra est beaucoup plus calme et s'adapte au style de la séquence, au cours de laquelle Vincent Cassel s'en donne à coeur joie grâce à dialogues écrits "sur mesure", intelligents mais qui ne nous permettent pas de vraiment cerner la personnalité du Roi de l'évasion.
A propos d'évasion, celle du centre pénitentiaire de la Santé se révèle spectaculaire et filmée avec un talent fou. Aussi géniale que celle de la fin du premier opus, tout aussi angoissante et nerveuse.
A ce moment-là, on a déjà eu droit à beaucoup d'action mais L'Ennemi Public N°1 insiste justement sur ce statut donné par la presse et la police. Le but de Richet est de présenter Jacques Mesrine sous un autre angle, développer sa personnalité, qui oscille entre le voyou, le showman qui dit certaines vérités dérangeantes, le bon père de famille et l'homme amoureux. L'interview donnée à Paris Match donne, une fois de plus, l'occasion à Cassel d'y aller encore plus loin dans le rôle de composition. L'acteur se lache complètement, jouant avec un débit impressionnant, une intonation parfaite digne des plus grands acteurs que le genre ait connu (on pense parfois à Lino Ventura, Jean Gabin) mais sans cabotiner, fort heureusement d'ailleurs.
Mais c'est dans les scènes d'action que cette deuxième partie se distingue. Efficaces et filmées à la Melville, elles reflètent bien la violence et la nervosité de Mesrine et ses comparses. Montées à la perfection, elles ont de quoi clouer le spectateur dans son fauteuil et de le tenir en haleine jusqu'au bon moment.
Richet va encore plus loin dans la violence, principalement avec la scène de la grotte, très angoissante et sans concession, ne tombant jamais dans le ridicule.
Quant à la scène finale, la tension atteint son summum. Entre les flics planqués et le couple Mesrine/Jonjainquot qui regarde de tous les côtés pour être certains de ne pas se faire arrêter, le suspense est grandiose. On sent son coeur battre à toute allure, même après la fusillade finale (sanglante, sèche et triste), en se disant que rares sont les polars Français à nous donner tant de sensations et d'émotions.
Même si on aurait aimé un film un peu plus long (sa relation avec Charlie Bauer est rapidement expédiée, dommage), le dyptique de Richet finit de la même manière qu'il a commencé : techniquement irréprochable, passionnant, riche et sans esbrouffe.
Le pari principal est gagné, à savoir raconter les évènements principaux de la vie d'un homme assassiné non pas pour ses frasques de gangster, mais bien pour sa volonté de changer la France, une France qui, à cette époque sous Giscard, était au bord de la dictature suite à cet attentat terroriste qui a aussi failli coûter la vie à une femme qui continue sa quête de vérité.