Laurent T. Lun 6 Oct - 16:33
Paris (2007 - Cédric Klapisch)
Paris est une oeuvre charnière dans la filmographie de Cédric Klapisch, qui signe ici son neuvième film. Oeuvre charnière car elle permet au cinéaste de se questionner sur son art et sur sa vie cinématographique à travers des personnages touchants, proches de lui mais aussi de son public. Le film n'apporte pas conclusion, donnant l'impression de se retrouver devant une ébauche de cinéma, un brouillon sublime, mature et d'une sensibilité rarement montrée dans le cinéma Français actuel.
Klapisch met en scène, dans ce film chorale, une ville lumière en pleine évolution, en plein changement plutôt que de la montrer sous un oeil vieillot, la reliant avec ces habitants dont la vie sera bouleversée par un évenèment intime, primordial, soit gai ou tragique. Le cinéaste évoque des questionnements sur le temps qui reste ou les gens qui passent. Pour le temps qui reste, on ne sait pas trop ce qu'il en est réellement. Le personnage incarné par Romain Duris (excellent d'ailleurs) ne sait pas si il va pouvoir guérir de sa maladie ou en mourir. Chez lui, une opposition étrange se forme, celle d'un homme cloîtré dans son appartement en regardant sans cesse l'activité extérieur de sa fenêtre à celle de sortir de chez lui et de survoler la capitale (les cinq dernières minutes sont, à ce titre, d'une incroyable émotion, tout en faisant douter le public concernant le destin de Pierre). Malheureusement, la forme chorale du métrage de Klapisch multiplie les personnages (parfois inutiles, tel que le Sénégalais en quête de bonheur et de richesse matérielle que seule la ville de Paris pourrait lui apporter) et les intrigues qu'il perd son fil conducteur, prenant des chemins pas toujours très clairs et n'arrive pas à taper juste d'un point de vue émotionnel. Cette tension dramatique tendra à se perdre au fil du métrage. Pourtant, Paris regorge de belles scènes, grâce à ses acteurs. Juliette Binoche, plus belle que jamais, est émouvante en mère de famille à la recherche de l'amour; Luchini est égal à lui-même, rentrant dans les clichés de l'acteur-philosophe faisant des tonnes; Dupontel, Gilles Lelouche et Julie Ferrier sont tous excellents. La réalisation n'est pas en reste. Très classieuse et optant pour un rythme assez lent, elle filme la capitale Française d'une manière très moderne, multipliant les plans d'une beauté parfois incroyable, mais ça ne suffit pas pour faire oublier les défauts de film pourtant efficace, mais dont l'émotion ne dure pas assez longtemps pour en être entièrement convaincu.